A en croire la presse et les sites spécialisés, "Mission: Impossible - Protocole Fantôme" serait une réussite indéniable qui, pour certains, dépasserait même le premier volet réalisé par Brian De Palma. Allons... Soyons sérieux. Si prendre son pied devant une telle déferlante d'effets spéciaux et de gadgets high-tech doit forcément passer par une justification aussi ridicule qu'embarrassante, il y a de quoi se poser des questions sur les critères de jugements actuels. Si le réalisateur Brad Bird apporte d'une certaine façon sa patte "Pixar" au film, ce n'est que pour mieux accentuer la fusion du monde réel et du monde virtuel: tempête de sable comparable aux pixels, écrans et autres jouets high tech qui n'en finissent pas de recouvrir la chair des protagonistes... Et ce n'est décidément pas une nouveauté, surtout dans le film d'action contemporain. Non pas que "Mission: Impossible - Protocole Fantôme" soit un si mauvais film, mais le comparer aussi hâtivement à un des blockbuster les plus passionnant des années 90 (le De Palma donc) montre bien qu'il y a un réel souci à se faire.
Petit retour en arrière: à la fin du premier "Mission: Impossible", Ethan Hunt (Tom Cruise) est devenu une abstraction, un organisme broyé par la technologie. Sa capacité à aimer (n'en déplaise aux suites..) se voit annihilée, son aura réduite à celle d'un homme qui est passé dans le domaine du théorique. Pour résumé, il est devenu un fantôme au pays de Brian De Palma. On connaît les différents de ce dernier avec Tom Cruise lors du tournage. Il n'est donc pas étonnant de se retrouver avec un personnage omnipotent (Jim Phelps/Jon Voigt) et une marionnette (Ethan Hunt/Tom Cruise). L'un manipule l'autre jusqu'à l'épuisement, en lui supprimant certaines informations et en falsifiant des plans. Grâce au montage, Jim Phelps réussit à arrêter le défilement filmique, d'une certaine façon. Mais ce défilement, figuré par le train à la fin du film, lui explosera au visage, Ethan Hunt ayant découvert les joies du cinéma (mensonge, hiérarchie etc).
Brad Bird quant à lui ouvre son film sur une course poursuite des plus banale et une évasion de prison sans saveur. Si la prison dans laquelle se trouve Ethan Hunt au début pourrait résumer l'état dans lequel se trouve le personnage de Tom Cruise tout au long du film (son lourd passé, sa femme supposée morte etc.), il n'empêche que Bird ne sait pas réaliser une scène en terme visuel. Sa "patte" n'est bonne qu'à esquisser des idées dont la laideur (une bagarre entre Ethan Hunt et un terroriste dans un parking, pour n'en citer qu'une...) n'a d'égale que l'idiotie d'un scénario baignant dans la ringardise. A part l'explosion du Kremlin, on est loin des éléments scenaristiques d'un David Koepp circa 1996: échanges et manigances à Dubaï, réception minable dans un palais indien... Mais que nous veulent-ils? Pourquoi? On se demande ce qui a retenu l'attention du publique et de la critique en France: serait-ce pour la plastique froide et le jeu inexistant de Léa Seydoux? En tout cas une chose est sûr: "Mission: Impossible - Protocole Fantôme" est déjà oublié tant les images qui l'animent sont dépourvue de croyance dans les possibilités du cinéma, sa propension à se révéler tel qu'il est.
Donald Devienne
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